Les règles à maîtriser pour un licenciement pour motif personnel

21 Juin 2013

Conformément à l’article L. 1231-1 du Code du travail, l’employeur comme le salarié peuvent prendre l’initiative de la rupture du contrat de travail à durée indéterminée. Lorsque la rupture du contrat résulte de l’initiative de l’employeur, ce dernier doit veiller à respecter le formalisme et les règles qui entourent le licenciement.


Qu’est ce que le licenciement pour motif personnel ?

Le licenciement pour motif personnel est celui qui est prononcé pour un motif « inhérent à la personne du salarié ». Le manquement sanctionné doit être reproché au salarié personnellement. L’article L. 1232-1 du Code du travail subordonne la légitimité du licenciement à l’existence d’une cause réelle et sérieuse.

La cause doit donc d’abord être réelle, ce qui implique la réunion des trois caractéristiques suivantes :

- la cause doit être  objective, c’est-à-dire que qu’elle doit reposer sur des faits ou des « griefs matériellement vérifiables »

- la cause doit exister, ce qui signifie que les faits allégués doivent être établis ;

- la cause doit être exacte, ce qui veut dire que les faits invoqués, doivent être la véritable raison du licenciement.

La cause doit ensuite être sérieuse : les faits invoqués doivent être suffisamment pertinents pour justifier le licenciement.

Il convient d’avoir à l’esprit que l’ordre public est attaché à la notion de cause réelle et sérieuse. Dans l’appréciation de la réalité et du sérieux de la cause, le juge n’est par conséquent pas lié par les qualifications données à certains faits par la voie du règlement intérieur, ou même par la voie conventionnelle ou contractuelle.

Par conséquent, aucune clause du contrat de travail ne peut valablement décider qu’une circonstance quelconque constituera une cause de licenciement. Il appartient au juge d’apprécier si les faits invoqués par l’employeur dans la lettre de licenciement constituent une cause réelle et sérieuse de licenciement (Cass. soc., 5 juin 2002, no 00-42.037 ; Cass. soc., 24 juin 2003, no 01-42.535)

Au contraire, si le contrat et la convention collective ne peuvent déroger à la loi dans un sens défavorable au salarié, ils peuvent en revanche limiter les causes de rupture dans un sens plus favorable.

Le licenciement pour motif personnel peut être décidé pour un motif disciplinaire, c’est à dire en raison d’une faute du salarié, ou en dehors de tout comportement fautif du salarié.

Comment le licenciement pour faute peut-il être caractérisé ?

L’employeur peut sanctionner par un licenciement un acte du salarié qu’il considère comme fautif. Selon les circonstances, la faute est constitutive soit:

- d’une cause réelle et sérieuse de licenciement ;

- d’une faute grave privative de l’indemnité de préavis et de l’indemnité de licenciement. Selon la Cour de cassation, la faute grave est définie comme la faute qui « résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis » (Cass. soc., 26 févr. 1991, no 88-44.908, Bull. civ. V, no 97). Le licenciement pour faute grave peut justifier une mise à pied conservatoire, mais le prononcé d’une telle mesure n’est pas obligatoire. La mise en œuvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits fautifs ;

- d’une faute lourde privative de toute indemnité y compris de l’indemnité compensatrice de congés payés. La faute lourde est définie comme « celle commise par le salarié dans l’intention de nuire à l’employeur ou à l’entreprise ». Seule la faute lourde permet l’engagement de la responsabilité pécuniaire du salarié et fonder une action en dommages et intérêts contre ce dernier.
 

En dehors d’une faute, quelles peuvent êtes les causes de licenciement pour motif personnel ?

Certains faits bien qu’ils ne soient pas fautifs, peuvent constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement. Il en est ainsi notamment des absences prolongés ou répétées pour maladie, de l’inaptitude physique à l’emploi à la suite d’une maladie ou d’un accident de travail, du refus d’une modification du contrat de travail décidée par l’employeur, de l’insuffisance professionnelle, de l’insuffisance de résultat ou de la mésentente entre salariés, ou du comportement du salarié dans sa vie personnel qui a causé un trouble caractérisé à l’entreprise.

Quelle est la procédure à respecter ?

L’employeur doit convoquer le salarié à un entretien au cours duquel il lui expose les motifs de sa décision et recueille ses explications : cet entretien est obligatoire.

La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge.

Lorsque le licenciement est envisagé pour un motif disciplinaire, la convocation doit être envoyée le plus rapidement possible et au plus tard dans les deux mois à compter du jour de la connaissance des faits par l’employeur.

La convocation doit préciser expressément qu’une mesure de licenciement est envisagée. Elle doit préciser la date, l’heure et le lieu de l’entretien, et rappeler la possibilité pour l’entretien de se faire assister par une personne de son choix appartenant à l’entreprise. Lorsque l’entreprise est dépourvue d’institutions représentatives du personnel, doivent être mentionnés, d’une part, la faculté pour le salarié de se faire assister par un conseiller de son choix inscrit sur la liste départementale, et, d’autre part, l’adresse des services où cette liste est tenue à la disposition des salariés (il faut mentionner à la fois l’adresse de la section de l’inspection du travail compétent et l’adresse de la mairie du lieu du lieu de domicile du salarié, s’il vit dans le département où est situé l’établissement, mairie de son lieu de travail sinon).

L’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de 5 jours ouvrables après la présentation au salarié de la lettre recommandé de convocation ou sa remise en main propre. Il doit se tenir au lieu où s’exécute le travail ou au siège social de l’entreprise et ne peut être fixé en un autre endroit sans motif légitime.

Si le salarié ne se présente pas à l’entretien, l’employeur peut poursuivre la procédure et lui notifier son licenciement.

L’employeur ou son représentant soit, lors de l’entretien préalable, indiquer au salarié le ou les motifs de la décision envisagée et recueillir les explications de ce dernier.

L’employeur qui décide de licencier le salarié doit lui notifier par lettre recommandée avec accusé de réception. La lettre ne peut être expédiée moins de 2 jours ouvrables après la date de l’entretien préalable. Si le motif invoqué est disciplinaire, la lettre de licenciement ne peut être envoyée plus d’un mois après l’entretien préalable.

L’employeur est tenu d’énoncer le motif du licenciement dans la lettre, les motifs doivent être précis et matériellement vérifiables : un défaut de motivation ou une absence de motifs précis équivaut à une absence de motif et rend le licenciement sans cause réelle et sérieuse. Les motifs énoncés dans la lettre de licenciement fixe les limites du litige : cela signifie que la qualification donnée par l’employeur au licenciement s’impose à lui, il ne peut pas modifier ou compléter les motifs indiqués.

 

La lettre de licenciement doit rappeler le déroulement de la procédure préalable, et doit préciser le nombre d’heures acquises au titre du droit individuel à la formation et la possibilité d’en demander le bénéfice pendant le préavis.
 

Quelles sont les sanctions auxquelles peuvent s’exposer l’employeur ?

L’employeur est passible de sanctions en cas de licenciement injustifié ou prononcé sans respect de la procédure légale ou conventionnelle. Les irrégularités de procédure passibles de sanctions visent toutes les inobservations ou irrégularités concernant un élément quelconque de la procédure. Il en est ainsi notamment :

- lorsque le salarié n’a pas été convoqué préalablement à la notification du licenciement;

- lorsque l’employeur n’a pas respecté le formalisme légal de la convocation

- lorsque l’employeur n’a pas respecté le délai de cinq jours ouvrables entre la remise de la convocation et l’entretien;

- lorsque l’employeur s’est opposé à l’assistance du salarié ;

- lorsque l’employeur s’est fait assister par une personne étrangère à l’entreprise ;

- lorsqu’il s’est fait assister par plusieurs personnes, de sorte que l’entretien s’est transformé en « tribunal » ;

- lorsque le licenciement a été notifié sans respect du délai après l’entretien préalable.

- les irrégularités concernant l’assistance du salarié par un conseiller portent notamment sur les manquements à l’obligation de faire figurer dans la lettre de convocation à l’entretien préalable l’adresse des services où la liste des conseillers est tenue à la disposition du salarié.

En principe, lorsque le salarié a au moins 2 ans d’ancienneté dans une entreprise de 11 salariés et plus, le tribunal saisi doit imposer à l’employeur d’accomplir la procédure prévue et de verser au salarié une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire. Cette sanction n’est prononcé que si le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse : les 2 indemnités ne se cumulent pas, sauf pour le non-respect des dispositions relatives à l’assistance du salarié par un conseiller extérieur lors de l’entretien préalable.

L’indemnisation due au salarié ayant moins de deux ans d’ancienneté ou travaillant dans une entreprise de moins de 11 salariés n’est pas soumise au maximum d’un mois de salaire. Pour ces salariés, les deux indemnités sont cumulables.

D’autres irrégularités en revanche, emportent l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement. Tel est le cas, notamment :

- du non-respect du délai de deux mois entre la connaissance des fautes disciplinaires reprochées au salarié et l’envoi de la convocation à l’entretien préalable;

- du défaut de consultation d’un conseil de discipline institué par la convention collective ou le règlement intérieur ;

- plus généralement, du non-respect des garanties conventionnelles ou statutaires susceptibles d’avoir un impact sur la prise de décision finale par l’employeur et/ou garantissant les droits de la défense du salarié ;

- de la notification verbale du licenciement ;

- de la notification du licenciement disciplinaire plus d’un mois après l’entretien préalable;

- d’un défaut d’énonciation des motifs dans la lettre de licenciement ;

- d’une énonciation de motifs imprécis, insuffisants, contradictoires ou erronés;

- d’une absence de pouvoir du signataire de la lettre de licenciement.

Lorsque le licenciement est injustifié, il est également considéré comme étant dépourvu de cause réelle et sérieuse. Lorsque le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse, l’employeur est passible des sanctions suivantes :

- lorsque le salarié a au moins 2 ans d’ancienneté dans une entreprise de 11 salariés et plus, le Tribunal peut proposer la réintégration du salarié. Si l’une des parties la refuse, il est alloué au salarié une indemnité qui est égale aux 6 derniers mois de salaire ; le remboursement des allocations chômages dans la limite de 6 mois ;

- lorsque le salarié a moins de deux ans d’ancienneté ou travaille dans une entreprise de moins de 11 salarié : l’indemnisation est calculée en fonction du préjudice subi.

Comme vous l’aurez constaté, les règles qui entourent le licenciement pour motif personnel sont très précises, et il convient d’être vigilent pour éviter une sanction par le conseil de prud’hommes qui peut être très lourdes. Cet article n’est évidemment pas exhaustif et il faut en amont d’une procédure de licenciement s’assurer du respect des règles légales, conventionnelles et jurisprudentiels.

Maître Ebru Tamur

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