La dénonciation d'un usage d'entreprise

16 Juin 2013


Par un arrêt du 16 novembre 2005, la Cour de Cassation a précisé sa jurisprudence concernant la dénonciation d'un usage d'entreprise.

Elle indique que pour opérer cette dénonciation, l'employeur doit, dans un premier temps, informer les représentants du personnel, puis, dans un deuxième temps, informer individuellement les salariés de la dénonciation de l'usage, laquelle ne prend effet qu'après un "délai raisonnable".

Dès lors, elle considère désormais que l'employeur ne peut dénoncer unilatéralement un usage que lorsqu'il a organisé régulièrement les élections des représentants du personnel qui interviennent nécessairement dans la dénonciation.

Ainsi, une entreprise sans représentant du personnel ne peut dénoncer un usage que tout autant qu'elle est en mesure de justifier ne pas être soumise à l'obligation d'organiser les élections ou de l'existence d'un procès verbal de carence aux dernière élections régulièrement organisées.

Comment dénoncer valablement un usage d'entreprise ?

L'usage est un mode informel de création de droits, résultant d'une pratique répétée et instaurée par l'employeur, marquant ainsi sa volonté implicite d'attribuer certains avantages aux salariés de l'entreprise. Toutefois, le chef d'entreprise peut désirer revenir sur l'avantage ou la tolérance ainsi octroyée et dénoncer l'usage.

La dénonciation d'un usage d'entreprise ne doit pas générer d'inégalité de traitement entre les salariés et doit répondre à une procédure stricte.

Un usage peut être le versement d'une prime annuelle (13e mois), un congés supplémentaire ou encore l'octroi de pauses. Il s'agit d'une pratique suivie dans l'entreprise, qui permet aux salariés de bénéficier d'avantages supplémentaires par rapport à ce à quoi ils ont droit en vertu de la loi.

Tant que l'usage n'a pas été dénoncé, vous êtes tenu de le respecter au même titre que la loi, la convention collective, ou le contrat de travail, quand bien même cet usage ne serait pas prévu dans un écrit.

A noter que c'est au salarié qui entend se prévaloir d'un usage, d'en rapporter la preuve par tous moyens.

L'égalité de traitement entre salariés

Lorsque vous instituez par usage un droit ou des avantages particuliers, vous êtes tenu d'en faire bénéficier tous les salariés placés dans une situation identique. De plus, les conditions d'attribution des avantages doivent préalablement être définies et contrôlables (1).

Toute différence de traitement doit reposer sur des raisons objectives dont le juge doit contrôler la réalité et la pertinence.

Attention lorsque vous envisagez de procéder à la dénonciation d'un usage en vigueur dans l'entreprise, vous ne pouvez pas supprimer un usage pour certains salariés et le maintenir pour d'autres (2). La seule différence de catégorie professionnelle ne peut en elle-même, justifier une différence de traitement. Il convient donc d'être particulièrement vigilant sur ce point.

Une procédure à respecter

En l'absence de règles légales de dénonciation de l'usage, ce sont les juges qui ont précisé les conditions cumulatives pour y mettre fin (3) :

  • l'information des représentant du personnel ;
  • une information individuelle des chacun des salariés ;
  • le respect du délai de prévenance.

A défaut, la procédure n'est pas valable.

La dénonciation et ses suites

L'usage qui n'est pas régulièrement dénoncé, demeure en vigueur. Il en résulte que le salarié peut réclamer l'avantage résultant de cet usage jusqu'à la dénonciation régulière de celui-ci ou la conclusion d'un accord d'entreprise ayant le même objet que l'usage antérieur (4).

Après la dénonciation, vous devez impérativement cesser d'appliquer l'usage, et ce dès la fin du préavis fixé. Dans le cas contraire, l'usage sera considéré comme maintenu et les salariés pourront exiger son application.

Si l'usage fait l'objet d'une stipulation dans le contrat de travail (exemple une prime), le fait de le dénoncer (cesser de la verser) s'apparente à une modification du contrat de travail du salarié . Or, toute modification du contrat de travail nécessite l'accord de ce dernier (6). Vous devez donc, dans un tel cas, suivre la procédure de modification du contrat de travail.
 

Références :

(1) Cass. Soc. 22 février 2006, n°04-43542

(2) Cass. Soc. 8 juin 2010, n°09-40614

(3) Cass. Soc. 25 février 1988, n°85-40821

(4) cass. Soc. 3 mai 2012, n°10-20738

(5) Cass. Soc. 22 janvier 1992, n°89-42840
 



 

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